Agnès Labreuil, substitute générale, a rencontré pour Femmes de Justice Madame Catherine
Champrenault, alors qu’elle s’apprêtait à quitter ses fonctions de procureure générale près la cour
d’appel de Paris pour prendre sa retraite.
Madame la Procureure générale vous apportez votre soutien à Femmes de justice depuis le début de l’association quelles sont les raisons de ce fidèle soutien ?
Je considère qu’il est intéressant que les femmes soient visibles dans la magistrature, car elles représentent plus de la moitié des effectifs et elles sont moins présentes dans les postes à responsabilité que les hommes. Il est important de faire émerger collectivement les problématiques de carrière rencontrées par les femmes pour sensibiliser leur environnement professionnel.
Vous êtes la première femme à occuper les fonctions de procureure générale de la cour d’appel de Paris, la plus importante cour de France par ses effectifs, son activité et son patrimoine immobilier Avez-vous le sentiment d’être ou d’avoir été une pionnière ?
Quand on est première de quelque chose, on est perçue comme une pionnière. Paradoxalement, je me suis sentie davantage pionnière du fait de mon parcours professionnel plutôt provincial, qu’en tant que première femme à ce poste. Au cours de ma carrière j’ai été très mobile (Tours, Strasbourg, Lille, Paris, Douai, Avignon, Basse Terre) et je crois que ma nomination en qualité de procureure générale à Paris a surpris, notamment en raison de ma carrière en province et en outre-mer. Il est donc possible d’arriver à des postes de responsabilité en ayant un parcours en dehors de la région parisienne.
Avez-vous rencontré des difficultés, en tant que femme, dans votre parcours professionnel, notamment dans l’articulation vie professionnelle /vie privée ?
J’ai eu la chance de faire ma vie avec un magistrat, ce qui a facilité nos projets de mobilité par le rapprochement des conjoints, et un homme concerné par la cause des femmes et l’organisation de la vie de famille, à laquelle il a participé activement. Jeune mère de famille, on peut avoir le sentiment de ne pas être assez disponible pour ses enfants et pour son métier. Il faut une organisation très serrée pour assurer, l’esprit libre des contraintes familiales, les audiences tardives, les permanences de nuit et de week-end …
Dans votre carrière, avez-vous été confrontée au « plafond de verre » ?
Oui, lorsque j’ai postulé comme substitut au tribunal pénal international avec l’assurance de la chancellerie que le profil recherché était un magistrat femme, de droit romain et que, finalement, le choix s’est porté sur un magistrat homme, de droit anglo-saxon. Je me suis interdite de postuler à des fonctions de chefs de juridiction au bout de 7 à 10 ans de carrière car j’avais de jeunes enfants. Après cette période, je n’ai pas été nommée dès ma première candidature assez tardive dans ma carrière et j’ai dû postuler à plusieurs reprises avant d’occuper un premier poste de chef de juridiction. J’ai attendu mais j’ai montré ma détermination, Il est important de se faire connaitre, de se faire repérer, je n’étais sans doute pas dans la filière des chefs de juridiction.
Pendant 29 ans, j’ai occupé des postes d’adjoints (premier substitut, procureur adjoint, chef de section, adjoint au chef de division, avocat général…). Ce sont les chefs sous l’autorité desquels j’ai œuvré qui m’ont donné le goût du management et qui m’ont conforté dans l’idée que je pouvais occuper des fonctions managériales. La reconnaissance de la hiérarchie révèle en vous un désir, une légitimité. Adjoint, on admire le plus souvent son chef et on réalise aussi que l’on pourrait faire certaines choses autrement, en complémentarité. Même si on commence à observer des changements dans les psychologies, les femmes ont souvent peur de ne pas être à la hauteur. Pourtant au parquet, les femmes ont toutes les qualités requises pour réussir, elles ont la même puissance de conviction que les hommes, la volonté d’être pédagogique dans leurs réquisitions. Au parquet de Strasbourg, j’étais en charge notamment du droit pénal du travail, j’ai pris plaisir à me spécialiser dans cette matière, à animer des formations pour les inspecteurs du travail, les fonctionnaires de la PAF, à tenir les Comités Opérationnels de Lutte contre le Travail Illégal (COLTI). J’arrivais à faire fonctionner le collectif et à faire comprendre aux institutions partenaires les exigences judiciaires et à l’audience je parvenais à convaincre du bien-fondé des poursuites engagées sur des procès-verbaux des administrations de contrôle. J’ai eu envie de partager ces compétences et mon expérience en devenant chef de juridiction.
Comment inciter, accompagner les femmes dans leur parcours professionnel pour accéder aux plus hauts postes à responsabilité ?
Il faut favoriser la mobilité géographique et fonctionnelle. Ce qui est important dans une carrière c’est de se renouveler. Il faut accepter de se mettre en risque, d’acquérir de nouvelles compétences, de découvrir un nouvel environnement. C’est ainsi que l’on donne le meilleur de soi. Idéalement il faudrait alterner les fonctions managériales et juridictionnelles. L’effort que l’on consent est bénéfique et le gage d’une carrière dynamique.
Au début de ma carrière j’ai été 9 ans sur mon premier poste car j’avais de jeunes enfants. Avec mon mari nous étions convenus que celui qui obtiendrait le premier un poste à responsabilité le prendrait et que l’autre le suivrait. J’ai connu deux périodes de célibat géographique d’un an et de six mois, ce n’est pas une situation idéale, mais c’est supportable lorsqu’il existe une perspective de rapprochement. Ma chance a été d’avoir un mari magistrat et féministe. Il est important de prendre davantage en compte les contraintes liées à certaines fonctions notamment au parquet. Les jeunes mères ont besoin d’être aidées financièrement, ce qui désormais est le cas par la rémunération des astreintes qui compensent en partie les frais de garde des enfants, car celles-ci qui pèsent sur le budget familial et d’avoir aussi des récupérations pour limiter le stress lié à la gestion du travail et de la vie familiale.
Quelles sont parmi vos pratiques managériales celles qui pourraient, selon vous, permettre de promouvoir la carrière des femmes ?
Je pense qu’il est essentiel de leur donner confiance, d’ouvrir leurs perspectives en les invitant à réfléchir à d’autres fonctions, de susciter leur candidature et de ne pas hésiter à les désigner comme responsable d’un service. On attend peut-être d’une femme plus de qualités qu’un homme, notamment relationnelles, pour les promouvoir.
Etre chef c’est amener chaque membre de l’équipe à donner le meilleur de lui-même. Une des clefs du
management est la bienveillance, ce qui permet aussi de comprendre qu’on fait bien ce que l’on aime faire. Je pense que le management féminin est plus collaboratif, plus participatif. Les femmes en responsabilité ont l’humilité ou le réflexe naturel de s’appuyer sur le collectif.
Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui souhaiteraient accéder à des postes à haute responsabilité comme ceux que vous avez occupés ?
Je leur conseillerais de se diversifier et d’élargir leur choix et leurs expériences des fonctions car c’est une source de richesse personnelle. J’insiste également sur la mobilité géographique. Il faut savoir s’arracher à son environnement familier pour mener une carrière riche.
La mobilité démontre vos facultés d’adaptation face à des problématiques nouvelles, des circonstances locales différentes. J’aime citer la phrase de Nelson Mandela : « Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends ». Quand on est dans le mouvement, on est vivant, on a le désir de partager avec les autres et partager, c’est apprendre. Accepter la mobilité c’est toujours osciller entre le bonheur de la découverte et le vertige de ne pas savoir. En croisant, en échangeant, on trouve la vérité. Le partage c’est très fort. Cela apporte de profondes satisfactions intellectuelles et morales.
Quelle est votre vision du parcours des femmes dans la magistrature de demain et de leur place ?
Je suis très optimiste. Il y a maintenant une dynamique qui ne s’arrêtera pas sur le rôle et la place des femmes. Pour moi la magistrature, comme la médecine ou l’enseignement comportent une dimension humaine et pédagogique. Requérir c’est une œuvre pédagogique. Soigner c’est, profondément humain comme l’est l’aptitude au règlement des conflits. Les femmes savent particulièrement le faire.
Robert Badinter avait soutenu l’arrivée de femmes au sein de l’administration pénitentiaire notamment parce qu’elles apportaient, en plus de leur compétence professionnelle, une dimension maternelle, que les détenus respectaient.
Pour moi, l’action répressive est une protection de la société mais aussi de l’individu qui commet une infraction. Ne pas réprimer la délinquance serait une forme d’abandon. La femme est protectrice aussi à l’égard des victimes. L’œuvre de justice s’inscrit dans une forme de fraternité. Il faut rappeler l’interdit et sanctionner la transgression sinon c’est la loi du plus fort qui l’emporte. C’est donc aussi accompagner les plus faibles.
La justice s’inscrit dans une démarche éducative et pacificatrice pour laquelle les femmes sont
particulièrement qualifiées.
Avril 2020
Pouvez-vous nous parler de votre parcours, de ses moments marquants et des constats que vous avez pu faire s’agissant des inégalités femmes hommes ?
Je dois dire tout d’abord que j’ai reçu une éducation que, pour l’époque (je suis née en 1954), on peut qualifier de féministe. Ma propre mère a toujours travaillé (enseignante), mon père n’a jamais ressenti, ni en tout cas exprimé de frustration de n’avoir pas de fils (nous sommes deux filles), le fait que nous fassions des études a toujours été considéré comme allant de soi, notre réussite scolaire faisait partie des priorités familiales, et j’ai donc commencé ma carrière, de ce point de vue-la, sans handicap ni matériel, ni éducatif, ni psychologique.
C’est peut-être la raison pour je ne me suis, très longtemps, pas posée de questions et même que je suis restée assez aveugle aux problématiques d’égalité femmes-hommes dans notre profession. Je me suis mariée, j’ai eu des enfants, j’ai, pendant un certain temps, « sacrifié » ma carrière du fait de la profession du père de mes enfants, mais pour moi cela allait de soi et n’était la source d’aucun regret. J’ai, à titre de compensation, « louvoyé » entre siège et parquet, entre première instance et appel, ce que j’ai d’ailleurs beaucoup aimé et ce qui m’a beaucoup apporté.
Les choses ont radicalement changé avec l’avancée en âge de mes enfants et une rupture conjugale qui, pour douloureuse qu’elle fût, m’a d’une certaine façon « libérée ». J’ai changé de région, je me suis affrontée à une grande juridiction de la région parisienne (VP Créteil), et j’ai commencé à ressentir des ambitions que je ne m’étais guère autorisée auparavant. Devenue conseillère à Versailles, la présidence des assises m’a aussi beaucoup aidée à m’affirmer, bien que, je dois l’avouer, je n’ai jamais souffert d’un véritable manque de confiance en moi-même, grâce à l’éducation que j’avais reçue.
Ensuite, ce sont des rencontres positives qui m’ont aidées dans ma réflexion et dans mes projets. Ce sont plus particulièrement deux hommes, les procureurs généraux avec lesquels j’ai eu successivement le privilège de travailler à Riom, qui m’ont aidée à briser ce « plafond de verre » qui n’est pas un mythe. C’est l’un d’eux qui pour la première fois a émis l’idée que je pourrais devenir procureure générale, l’autre a soutenu à son tour le projet, et c’est grâce à eux que j’ai osé. Je pense donc très important de rencontrer les bonnes personnes qui vous aident à franchir certains pas, d’où l’intérêt d’un tutorat pour celles qui n’ont pas la chance de faire de telles rencontres.
Je n’ai pour autant pas eu le sentiment d’être une « pionnière », je n’ai jamais été la première, ni la seule, et je pense que j’ai eu beaucoup de chance de ne jamais avoir à composer avec des chefs misogynes ou imbus de la supériorité masculine. Je me souviens toutefois d’un président de TGI siège d’une cour d’assises que je présidais, en alternance avec un collègue masculin, et qui, lorsqu’il nous rencontrait ensemble, ne s’adressait qu’au collègue en question. Mais cela ne suffisait certainement pas à me déstabiliser…
Pour le reste, je n’ai pas l’impression que dans notre corps, les femmes soient véritablement affrontées à de l’exclusion ou de la discrimination. Il me semble plutôt qu’il existe un vrai phénomène d’autocensure, de culpabilité inconsciente ou non à l’idée de négliger famille et enfants en sollicitant des postes requérant une très grande disponibilité, et je fais aussi l’hypothèse que la réussite professionnelle ne représente pas pour les femmes une valeur aussi forte que pour les hommes. Il s’agit sans doute du résultat de stéréotypes de genre, d’une éducation très « genrée », mais peut-être pas seulement, je crois qu’il faut se garder, à cet égard, de toute explication exagérément simpliste. En tout cas, beaucoup de femmes ont certainement besoin d’être aidées à « oser », de même que certains hommes doivent être aidés à placer les ambitions de carrière à la juste place dans leur existence.
Vous intervenez dans de nombreuses formations à l’ENM, notamment sur les questions de management et vous êtes membre du conseil supérieur de la magistrature. Quels freins percevez-vous sur le chemin de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein du ministère de la justice, et quels leviers vous semblent à explorer ?
J’accorde, je dois le dire, une importance particulière à la notion de « communauté de travail », et j’estime que trop souvent les magistrats ne se préoccupent pas suffisamment des conditions de travail et des contraintes des fonctionnaires avec lesquels ils travaillent, qu’ils soient des hommes ou des femmes.
S’agissant plus particulièrement des femmes qui constituent l’immense majorité des fonctionnaires avec lesquels nous travaillons au quotidien, je regrette que les possibilités de progression de carrière qui sont les leurs soient très réduites. Leurs salaires ne sont en effet pas assez importants pour « rentabiliser » les frais qu’engendre inévitablement une mutation dans un poste plus important, souvent à distance de la famille. Par ailleurs la plus récente réforme statutaire a entraîné une importante raréfaction des postes de catégories A et donc des possibilités de progression, étant précisé par ailleurs que les
conditions à remplir pour obtenir un poste de greffier fonctionnel sont très, voire trop restrictives. Il y aurait donc, à mon avis, des efforts d’accompagnement logistique et financier pour aider les greffières, les secrétaires administratives, les adjointes administratives à progresser. Au-delà, la reconnaissance sincère, honnête intellectuellement, de leur participation à l’œuvre de justice mériterait d’être renforcée. Il me semble que l’ENM a son rôle à jouer à cet égard. Je constate, en cette période de « PCA », la part que prennent les fonctionnaires à la continuité du service public de la justice, et ce besoin de reconnaissance est à mes yeux encore renforcé.
S’agissant des agents de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, je ne me crois pas autorisée à émettre des recommandations, faute de connaître suffisamment les problématiques en cause. Je remarque en tout cas que les directrices d’établissement pénitentiaire sont de plus en plus nombreuses et mon expérience personnelle me révèle qu’elles sont parfaitement à leur place dans de tels postes, dans un milieu pourtant majoritairement masculin.
Pour en venir aux magistrats, et au vu de mon expérience, maintenant supérieure à une année, de participation aux travaux de la formation « parquet » du CSM, je constate que la DSJ mène une politique volontariste d’accès des femmes aux postes de la hiérarchie haute et moyenne. Il appartient cependant au CSM de veiller à ce que cette politique soit menée avec discernement et équité. Je reviens par ailleurs sur cette idée d’autocensure des femmes. Je crois, par exemple, savoir que le « vivier » des présidents et premiers présidents n’est pas considérable, et je fais l’hypothèse que bien des femmes qui feraient une excellente présidente, quelle que soit la taille de juridiction, ou une excellente première présidente, ne franchissent pas le pas. Un accompagnement plus soutenu des carrières (mais de grands progrès ont déjà été accomplis à cet égard) est nécessaire. Je suis également persuadée que les chefs de juridiction et de cour ont un rôle considérable à jouer dans la détection des potentiels et dans la naissance des vocations.
Ce dont j’ai bénéficié en mon temps, j’essaie de le « rendre » aux jeunes et moins jeunes magistrats des parquets de mon ressort, femmes ou hommes d’ailleurs. Il y a dans les parquets du ressort des jeunes gens et des jeunes femmes qui feront le moment venu, et même assez rapidement, d’excellent(e)s procureur(e)s. Ce que je dis plus spécifiquement aux jeunes femmes, c’est qu’elles ont le droit d’être ambitieuses !
Par ailleurs, je crois qu’il est important de faire en sorte que les conditions de travail soient (à peu près) compatibles avec une vie personnelle et familiale normale. Cela concerne aussi bien les hommes que les femmes, je le souligne, car des vies de famille équilibrées supposent, c’est mon avis, un investissement identique des pères et des mères. J’ai pour ma part donné des instructions pour recommander la possibilité d’une journée de télétravail par semaine (je ne parle pas de la période actuelle…) et je pratique de même au parquet général. J’ai aussi recommandé une récupération au moins minimale, selon des modalités adaptées à la taille des juridictions, des permanences. Cela n’a rien d’évident en pratique…
Pour quelles raisons avez-vous choisi d’adhérer à l’association FdJ, et que représente notre
association pour vous ?
Mes motivations étaient en réalité assez confuses, assez peu explicites dans mon esprit. Je dirais volontiers que cela m’a paru aller de soi. J’ai été un peu déçue quand j’ai constaté que l’association était réservée aux femmes de justice de catégorie A, tout en comprenant l’intérêt de ne pas créer un « monstre » réunissant des profils et des objectifs trop différents. Il me semble à cet égard que l’association est désormais assez mature pour aider les « autres femmes de justice » à créer leur propre structure de promotion. Il me semble qu’elle va aussi pouvoir/devoir travailler à la promotion de la mixité, qui est en péril dans notre ministère. Ses réflexions seront sans aucun doute utiles pour faire avancer ce sujet.
Au-delà, je conçois l’association comme un lieu d’échanges, de rencontre avec des « modèles » (ou des « contre-modèles »), de réflexion, de soutien, de mutualisation des « solutions ».
FdJ accompagne les femmes dans la construction de leur projet professionnel depuis le début, notamment par le biais du coaching et du mentorat.
En quoi cette action vous semble t’elle nécessaire ? Quels conseils pourriez-vous donner aux adhérentes qui s’interrogent sur leur parcours, sur la façon de faire les bons choix et de concilier vie professionnelle et vie personnelle ?
Je l’ai déjà dit, cet accompagnement à la construction du projet professionnel est indispensable, notamment aux femmes qui n’ont pas eu la chance de faire les « bonnes rencontres » ou qui doutent de leurs compétences. Les conseils que je donnerai aux adhérentes, à la lumière de ma propre expérience, c’est d’oser, de se faire confiance, de s’organiser, de mobiliser les ressources familiales, amicales, de faire confiance au conjoint quand il y en a un, aux enfants quand il y en a, car ils sont bien plus autonomes qu’on le pense souvent, de ne pas succomber à la culpabilité, enfin de ne pas se mettre la barre trop haut. Nous n’avons pas besoin de collègues, de chefs parfaits, mais qui aiment ce qu’ils font, qui y croient, qui sont capables d’écoute, de partage, qui restent modestes et soucieux de progresser, qui ont le sens de l’équipe et qui savent faire vivre et fonctionner une équipe de travail. Et qui savent déléguer, faire confiance !
Février 2020
Quels sont les constats que vous avez pu dresser en arrivant au ministère de la Justice sur
la mise en œuvre des politiques publiques en faveur de l'égalité ?
Quand j’ai pris mes fonctions de directrice de la protection judiciaire de la jeunesse il y a maintenant trois ans, j’ai pu constater que cette question était profondément ancrée dans les valeurs de notre institution mais que le ministère n’avait pas développé une approche transversale de ce sujet. Dans le même temps j’ai pu également mesurer combien la mise en œuvre des politiques publiques en faveur de l'égalité pouvait être différente en fonction des secteurs d’activité du ministère. En effet, les problématiques d’exercice professionnel ou de recrutement ne sont, à l’évidence, pas identiques en fonction des métiers.
Une dynamique positive me semble avoir été engagée, le Président de la République ayant, fin 2017, consacré l’égalité entre les femmes et les hommes « grande cause nationale du quinquennat ». Cela s’est traduit par la nomination de la Haute fonctionnaire à l’égalité Femmes-Hommes, Isabelle Rome, chargée par la garde des Sceaux de définir et mettre en œuvre cette politique et de coordonner le suivi du plan d’action interministériel en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Un comité égalité femmes/hommes a ensuite été mis en place, avec l’ensemble des directions et l’IGJ, et des axes de progrès ont été identifiés. La publication en 2019, du premier baromètre égalité, sur l’accès des femmes et des hommes aux postes de hiérarchie au sein de chacune des directions, a permis, je le crois, d’objectiver un certain nombre de constats et d’engager des pistes de travail utiles. Le 7 mars 2019, j’ai eu le plaisir de signer avec la garde des Sceaux et nos directeurs interrégionaux l’acte d’engagement pour une parole non sexiste. Ce texte reprend une série de recommandations simples, claires et concises et montre l’exemple à suivre pour mieux parler et inviter à mieux agir.
Je salue le fait qu’en 2020 la dynamique ministérielle se poursuive avec notamment la signature de l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la candidature au label Égalité professionnelle puis au label Diversité.
Quelle est la situation de la DPJJ, du point de vue de la mixité des métiers et de la parité
dans l'accès aux postes d'encadrement et de direction ?
La DPJJ comprend une majorité de femmes et se distingue des autres directions du ministère de la Justice avec 75 % de femmes aux postes d’encadrement supérieur. Chez les directeurs fonctionnels, avec 52 % de femmes, la mixité est assurée. Toutefois, les femmes sont très minoritaires aux postes les plus élevés en hiérarchie, en particulier à la tête des directions interrégionales. Elles par contre sont beaucoup mieux représentées aux postes de direction territoriale, avec 50 % de directrices territoriales. En 2017, chez les directeurs de service, on compte 67 % de femmes. Il n’y a donc pas de mixité, la population des directeurs de service reste largement féminisée. Pour les postes de directeurs fonctionnels, les femmes sont en revanche proportionnellement moins nombreuses et la répartition hommes/femmes diffère selon le type d’emploi occupé. La proportion de femmes occupant un emploi de directeur fonctionnel de la PJJ a toutefois évolué positivement, passant de 26 % à 48 % de directrices fonctionnelles entre 2008 et 2017. Chez les éducateurs et les éducatrices, on constate que la mixité qui prévalait jusqu’ici est en passe de ne plus être la règle dans nos services, 75% des lauréats du concours étant désormais des femmes.
Si à la PJJ nos efforts ont permis de rééquilibrer progressivement la place des femmes et des hommes dans l’encadrement, il reste encore des citadelles à faire tomber, et à l’inverse nous devons prêter une attention particulière au recrutement de nos éducateurs et éducatrices afin de garantir une mixité dans les équipes éducatives de nos établissements et services.
Avez-vous identifié des pratiques ou des dispositifs favorisant la diversité et l'égalité qui pourraient être transposés au sein du ministère de la justice ?
Les pratiques et dispositifs prévus dans l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au ministère de la Justice me semble aller dans le bon sens. Je pense en particulier au dispositif ministériel de signalement ayant pour objet de recueillir les signalements des personnels, prévu également par la loi de transformation de la fonction publique, à la réflexion en cours sur la mise en œuvre d’une plateforme ministérielle d’écoute, à la diffusion d’un guide pour sensibiliser le personnel aux agissements sexistes, à la création d’outils de
communication innovants sur internet sur le sexisme ordinaire dans la fonction publique ou encore au lexique des violences pour mieux les identifier au quotidien.
Quelles sont vos pistes ou vos projets pour progresser l'égalité professionnelle et la parité
au sein de la DPJJ ?
A la protection judiciaire de la jeunesse, nous avons par exemple désigné des référents égalité dans les services déconcentrés qui assurent le relais sur ces questions et font remonter les données relatives à l’égalité, que ce soit en matière de ressources humaines, de formation ou de politiques publiques. Afin de participer à la lutte contre les stéréotypes et les discriminations, des formations de sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes sont programmées en formation initiale à l’ENPJJ. Les formations de sensibilisation à l'égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre les discriminations font aussi partie de l'offre nationale de formation continue.
Nous allons amplifier nos efforts dans la formation et la sensibilisation des jurys de concours en matière de lutte contre les stéréotypes et les discriminations, et en parallèle instaurer une procédure de recrutement exemplaire pour les contractuels. Le renforcement de la sensibilisation est également prévu sur le droit à la déconnexion, l’équilibre entre vie familiale et vie professionnelle, la possibilité de poser des congés familiaux ou de bénéficier du télétravail.
Enfin, la DPJJ va mettre en œuvre de nouvelles actions dans le domaine de la gestion des ressources humaines avec notamment la féminisation des répertoires des métiers et de l’ensemble des fiches de poste ou l’égal accès des femmes et des hommes à la formation. Plus globalement je pense que nous pouvons mesurer à la fois le chemin accompli en matière d’égalité femmes/hommes et de mixité depuis quelques années pour nous en féliciter, et celui qu’il reste à parcourir collectivement dans notre ministère et en fonction des spécificités de chaque métier.
Janvier 2020
Comment ces questions de mixité, d'égalité et de parité étaient-elles traitées au sein des ministères dans lesquels vous avez exercé auparavant ? Avez-vous identifié des pratiques ou des dispositifs favorisant la diversité et l'égalité qui pourraient être transposés au sein du ministère de la justice ?
Lors de mon arrivée au ministère de la justice, j’ai pu constater que d’autres ministères, comme l’Intérieur, étaient en avance sur la mise en œuvre des politiques publiques en faveur de l’égalité. En effet, le ministère de l’Intérieur s’est doté d’un protocole relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dès 2014, autour de 4 axes : le dialogue social pour parvenir à l’égalité professionnelle, une égalité effective dans les rémunérations et les parcours professionnels, une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle, et la lutte contre le harcèlement moral et sexuel. Cette démarche a été reconnue par l’obtention du label « égalité professionnelle entre les femmes et les hommes » en 2018.
Bien sûr, le ministère de la Justice a beaucoup évolué sur la dernière période ; nous avons notamment engagé depuis mars 2018 une concertation qui doit aboutir à la signature d’un protocole relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes du ministère de la Justice. Ce protocole pose la question de l’égalité effective dans les rémunérations et dans les parcours professionnels, celle d’une meilleure articulation entre vie professionnelle et personnelle, du renforcement de la prévention des violences sur le lieu de travail ou de la lutte contre le harcèlement et les agissements sexistes. C’est donc tout naturellement que la direction de l’administration pénitentiaire s’est investie dans ces travaux et surtout, qu’elle s’engagera dans les actions ciblées qui s’ensuivent : c’est bien là que les choses se jouent.
Quelle est la situation de l'administration pénitentiaire, du point de vue de la mixité des métiers et de la parité dans l'accès aux postes d'encadrement et de direction ?
Les métiers pénitentiaires sont historiquement, du fait des missions de chacun de nos corps, des métiers plutôt masculins. Depuis quelques années cependant, cette situation évolue fortement en raison de la réussite massive des femmes aux concours, tous corps confondus, si bien que la représentation masculine a reculé au sein de la direction de l’administration pénitentiaire pour atteindre 65% d’hommes sur un effectif total de 38 260 agentes et agents au 31 décembre 2017 (Baromètre égalité femmes-hommes 2019). Malgré cette progression, comme dans d’autres ministères, les femmes demeurent sous représentées dans les postes les plus élevés. Je suis très attaché à impulser une politique active de promotion interne, en veillant notamment, à parcours et compétences équivalents, à mettre en avant les profils féminins, et en constituant des viviers de cadres dirigeants.
S’agissant du corps des directeurs des services pénitentiaires, 114 sont chefs d’établissement dont 58% d’hommes (soit 66) et 42% de femmes (soit 48). La mixité du corps est une réalité. En 2019, 1 femme directrice des services pénitentiaires a été promue à la classe exceptionnelle sur 4 promotions, 1 femme DSP promue à l’échelon spécial pour 6 promotions et 12 femmes promues à la hors classe sur 21 promotions. Aux postes les plus élevés, on compte 4 femmes directrices interrégionales sur 11. S’agissant des directeurs des services pénitentiaires d’insertion et de probation (DPIP), le corps est majoritairement féminin avec 67 % femmes (soit 372) et 33% hommes (soit 185) pour un effectif global de 551 (au 1er novembre 2018). 2 femmes ont été promues à la classe exceptionnelle sur 6 promotions et 3 femmes promues à la hors classe sur 6 promotions, en 2019.
La promotion de la parité ne peut toutefois être purement quantitative. Nous veillons àmettre en place des règles de gestion permettant de mettre en adéquation les mutations avec les contraintes scolaires, la mise en place de viviers genrés pour les promotions de grade des DSP et des DPIP, l’accompagnement de la mobilité des personnels (réflexion sur un accord-cadre pour la mise en place d’une plateforme de déménagement, par exemple), etc.
Dans cette optique d’accompagnement et de promotion, j’ai souhaité mettre un place un dispositif de mentorat. Depuis 2017, ce mentorat rassure et conforte les DSP dans leur mission et leur apporte un soutien essentiel en début de carrière.
Quelles sont vos pistes ou vos projets pour faire progresser l'égalité professionnelle et la parité au sein de la direction de l'administration pénitentiaire ?
La phase de recrutement est une étape essentielle pour faire progresser l’égalité et la parité. Les membres du jury doivent être sensibilisés à la lutte contre toutes les discriminations, aux principes de respect et d’égalité. C’est pourquoi, une charte de déontologie des membres de jury sera prochainement diffusée, qui rappelle les principes d’égalité, de parité et de lutte contre les discriminations.
Le plan national de formation des cadres porte cette volonté, notamment sur la question des discriminations. L’égalité effective dans les parcours professionnels doit passer par une déconstruction des stéréotypes sur les métiers pénitentiaires. Nous menons de nombreuses actions de présentation des métiers dans les établissements scolaires et supérieurs. Certaines directions interrégionales traduisent aussi notre engagement au travers de conventions de stage avec des filières bac pro sécurité, qui représentent un bon vivier pour les corps de surveillance.
Quel regard portez-vous sur le traitement de la question de la féminisation au sein du ministère de la justice ?
Depuis 1946, l’égalité entre les femmes et les hommes est un principe constitutionnel : « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme » ; ce principe a été complété par la loi constitutionnelle de 2008 qui dispose que la « loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales » : le ministère du droit qu’est le nôtre doit évidemment être à la pointe de l’égalité entre les femmes et les hommes. De ce point de vue, la nomination de la Haute fonctionnaire en charge de l’égalité des droits confirme lecaractère prioritaire de cette politique, sa volonté de l’incarner, d’aiguillonner aussi les directions métiers. On a vu avec le Grenelle, cet automne, l’apport considérable de cette organisation pour le ministère.
Concernant la féminisation à proprement parler, il y a ce que je vous ai dit et puis il y a aussi des symboles : je suis ainsi fier de compter parmi les rangs des ERIS la première femme officier depuis mars 2019, fier aussi que la directrice de Fleury, plus grande prison d’Europe, soit depuis plusieurs années, une femme extraordinaire. Fier aussi que les deux directeurs des services pénitentiaires détachés dans l’emploi d’inspecteurs généraux de la Justice soient deux femmes.
Janvier, 2020
Comme beaucoup de hauts magistrats, votre parcours est jalonné de nombreuses mobilités géographiques. Quelle expérience avez-vous pu en tirer, notamment sur l’articulation de ces mouvements avec la vie personnelle, et comment mieux accompagner cette articulation ?
Si la mobilité géographique des magistrats répond à des exigences professionnelles bien connues et généralement admises, il ne faut pas en sous estimer les impacts sur la vie personnelle et familiale, a fortiori lorsque le ou les postes en question sont localisés à l’étranger. Mon parcours m’a conduit à en faire largement l’expérience, au cours de 15 années passées en détachement successivement en Allemagne (Landau, Baden Baden, Bonn et Berlin) puis aux Pays-Bas (La Haye), dont 6 années de célibat géographique. Le regroupement familial aura permis de couvrir les 9 autres années, au prix toutefois d’une disponibilité contrainte (mais assumée) pendant 4 ans de mon épouse, elle-même magistrat de l’ordre judiciaire. Je dois à la vérité de préciser que notre ministère a eu le souci d’accompagner au mieux ce parcours en nous aidant à trouver chacun un équilibre professionnel dès que le contexte géographique et institutionnel y était favorable. De fait, si ma nomination comme magistrat de liaison dans les deux capitales allemandes successives (Bonn puis Berlin à compter de 1999) n’aura pas permis à mon épouse de connaître une affectation judiciaire (elle a, en revanche, pu enseigner le droit français en langue allemandes aux Universités de Berlin et de Potsdam pendant notre séjour berlinois), ma nomination à Eurojust s’est trouvée accompagnée de sa nomination, à son tour, comme magistrat de liaison dans la capitale néerlandaise pendant une partie de la durée de notre séjour aux Pays-Bas, à la faveur de sa disponibilité, de son expérience professionnelle antérieure mais, aussi et surtout, de sa pratique courante du néerlandais, langue de travail indispensable dans ce poste.
Cette illustration personnelle démontre la difficulté liée aux parcours parallèles ou simultanés dont la réussite, par définition très aléatoire, repose sur des compromis permanents et sur une attention très vigilante au bien-être du conjoint moins favorisé au plan professionnel. Cette expérience s’est, au demeurant, trouvée confortée par l’observation des carrières de nos collègues étrangers, eux-mêmes confrontés aux mêmes freins psychologiques ou administratifs dans la réalisation d’un parcours innovant. Pour autant, mon épouse et moi-même avons croisé plusieurs magistrats allemands ou néerlandais, le plus souvent collègues féminines d’ailleurs, qui ont choisi une carrière internationale. Dans la plupart des cas, le choix professionnel avait été facilité par une carrière compatible du conjoint ou résultait d’une option assumée pour le célibat géographique. Dans tous les cas, les collègues n’avaient pas d’autre charge de famille, notamment pas d’enfant.
Comment repérer les femmes qui ont du potentiel et les inciter à prendre des responsabilités, comment leur faire une placedans les organigrammes ou les institutions, et leur donner confiance, lorsqu’elles sont en responsabilité ?
De mon point de vue, c’est d’abord une question de volonté : d’abord pour la candidate de briguer un poste de responsabilité, mais aussi pour le manager de savoir repérer les talents professionnels et leur faire confiance, indistinctement du genre. J’ai pu observer, dans mes responsabilités successives comme chef de parquet ou de parquet général, que les candidatures féminines à des fonctions d’encadrement intermédiaire augmentent, comme si des tabous s’estompaient progressivement. Pour autant, les fonctions de direction (chef de juridiction en particulier) continuent d’être problématiques pour nombre de femmes lorsqu’elles ont charge de famille : la disponibilité simultanée qu’exigent de telles fonctions professionnelles et celle requise pour élever des enfants, par hypothèse plutôt en début de carrière, est alors vécue comme un frein majeur, la préférence étant le plus souvent donnée au rôle de mère.
Un tel choix est noble et mérite tout le respect des collègues masculins. Il doit aussi pouvoir être (ré)compensé par un accès ultérieur à des responsabilités managériales de premier plan. Là encore, c’est une question de volonté, des pouvoirs publics cette fois.
Quel regard portez-vous sur la féminisation des métiers du droit et l'équilibre entre les femmes et les hommes dans le monde professionnel ?
La justice est une perpétuelle recherche d’équilibres, à l’image de la balance que tient l’Allégorie Justitia. Equilibre entre les individus comme entre hommes et femmes. Les équilibres au sein de la société passent aussi par l’équilibre au sein même de l’institution chargée de rendre la justice. Si la féminisation croissante de la profession de magistrat rend incontestablement justice à la trop grande masculinité de la profession, observée jadis et jusqu’il y a encore une trentaine d’années, sa persistance poserait, à terme, la même difficulté et en vertu du même principe d’équilibre. A cet égard, il n’est pas indifférent de relever que la féminisation rapide du corps des magistrats judiciaires français ne trouve pas nécessairement un écho comparable chez nos voisins européens, notamment allemands.
L’une des multiples explications de ce contraste tient en particulier au fait qu’en France, les infrastructures sociales et économiques favorisent plus largement le travail de la femme, à fortiori lorsqu’elle est maman. J’avais ainsi observé une situation nettement moins généreuse pour les collègues féminines allemandes, souvent contraintes de faire un choix radical entre parenté et carrière, à défaut d’infrastructures sociales leur permettant de concilier les doubles contraintes. Ces difficultés, combinées à la volonté croissante des femmes allemandes orientée vers la réalisation d’un parcours professionnel autonome, expliquent sans doute aussi, et pour une part non négligeable, la différence observée entre les taux de natalité de nos deux pays. A l’image de son étymologie, tirée du latin aequa libra (« la balance égale »), l’équilibre est, dans la nature, la figure la plus difficile à trouver….et, une fois trouvée, à conserver.
Muriel Guégan est nommée directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer à compter du 1er septembre. Elle était auparavant inspectrice générale à l'Inspection générale de la Justice.
Je suis honorée de la confiance qui m'est témoignée à l'occasion de ma nomination en qualité de directrice interrégionale de la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer. Je rejoins le collège des directeurs et directrices interrégionaux et suis fière à ce titre de devenir la cinquième femme à l'intégrer.
Tout au long de ces années au service de notre administration, j'ai mené des projets et travaillé avec les équipes dans le respect des hommes et des femmes qui la composent et celui de la richesse et de la diversité des métiers du service public pénitentiaire. Notre métier est difficile, c'est la raison du niveau d'exigence qu'il requiert. Je suis consciente de l'envergure géographique singulière du poste de cheffe de la MOM. Elle déterminera la spécificité de mon action.
C'est une nouvelle page dans mon parcours que je vais écrire avec enthousiasme et énergie. Les projets de construction de nouveaux établissements pénitentiaires de Koné, de Saint-Laurent-du-Maroni, de rénovation ou d'amélioration des services pénitentiaires en général, et d'insertion probation en particulier, seront l'occasion d'un travail collectif pour l'amélioration de la prise en charge des publics ; ils permettront également de démontrer et développer des savoir-faire des professionnels qui exercent au plus près des réalités quotidiennes.
En premier lieu, pouvez-vous évoquer pour nous votre parcours professionnel ?
J'ai découvert les métiers de greffe en faisant du baby-sitting dans une famille qui côtoyait un couple de greffiers en chef...
A l’issue de mes études de droit à l’Université de Montpellier, j’ai été admise au concours de greffier en chef en 1977. Mon premier poste a été celui de directrice de greffe du tribunal d'instance de Montélimar qui comptait sept fonctionnaires. J’y suis restée un peu plus de six ans. En mars 1985, j’ai obtenu une mutation pour rapprochement de conjoints au tribunal d'instance de Longjumeau. Les fonctions étaient les mêmes mais la juridiction plus importante puisque 28 fonctionnaires y étaient affectés.
En mars 1994, j’ai réalisé mon avancement au 1er grade au greffe du tribunal de grande instance de Paris. J’ai alors pris la responsabilité du service pénal composé de 250 fonctionnaires, suivi plus particulièrement la mise en place de la nouvelle chaîne pénale et procédé aux réorganisations qui l’accompagnaient. En 1996, j’ai changé de service pour la chaîne civile où j’ai piloté l’implantation de Winci et les réorganisations de services en résultant.
En novembre 2001, j’ai obtenu ma mobilité au TGI d'Evry où j’ai géré la chaîne pénale et mis en place l'ARTT dans l’ensemble de la juridiction. J’y suis restée trois ans puis j’ai pris la direction du greffe du TGI de Melun.
Enfin, c’est en septembre 2010 que j’ai été nommée sur le poste de directrice de greffe du tribunal de grande instance de Versailles qui compte 206 fonctionnaires.
Pouvez-vous nous parler de votre métier et de vos fonctions au TGI de Versailles ?
Mon parcours diversifié m’a apporté des compétences professionnelles qui m’ont permis d'assumer des responsabilités de plus en plus importantes. Il m’a aussi donné l'envie de découvrir des univers nouveaux, chaque structure ayant des organisations adaptées à la taille et à la diversité des contentieux traités.
Tout au long de ma carrière, j'ai bénéficié d'une formation continue de qualité tant à l'école des greffes qu'en formation régionale. J’ai aussi apprécié les quelques formations communes organisées avec l'ENM auxquelles j’ai participé et notamment, le plan de formation des cadres que j’ai suivi d'abord comme stagiaire puis comme co directrice. Pendant de nombreuses années, j’ai d’ailleurs moi-même assuré des formations en qualité de formatrice occasionnelle. J’ai aussi pris part à des jurys de concours et à de nombreux groupes de travail sur le référentiel des métiers de greffe, le métier de greffier en chef, la formation des greffiers et des greffiers en chef, les GARM et les GAM...
Les fonctions de directeur de greffe ont de multiples facettes qui vont de la gestion des ressources humaines à la gestion budgétaire et des bâtiments en passant par l'organisation des services, le dialogue social, la direction partagée avec les chefs de juridiction, les échanges avec le service administratif régional et l'ensemble des partenaires, auxiliaires de justice, autres administrations ou directions. J'ai découvert à Paris le fonctionnement en équipe que j'ai retrouvé à Versailles avec une équipe de dix directeurs de service permettant d'apprécier et de mesurer la force et l'efficacité de projets menés en complémentarité.
L'évolution de nos métiers a suivi l'évolution de la société avec le développement des nouvelles technologies mais aussi une professionnalisation de plus en plus grande nécessitant une maîtrise des outils et une réflexion permanente sur nos méthodes de travail.
J’ai choisi de partir à la retraite avant de ne plus pouvoir exercer mes fonctions avec autant d’implication, la nécessité de réactivité de plus en plus exigeante et les évolutions en cours et à venir demandant une énergie que je tiens à conserver le plus longtemps possible pour me consacrer désormais à d’autres passions.
Ce départ marque une étape importante après 38 ans de vie professionnelle qui a contribué à mon épanouissement avec une recherche permanente d’un équilibre entre vie privée et vie professionnelle.
Quels sont vos constats en matière de mixité, de parité et d’égalité professionnelle ?
Dès mon arrivée au Ministère de la Justice, j'ai constaté que les postes de responsabilité étaient occupés par les hommes alors que les greffes étaient déjà très féminisés. J'ai été la première femme nommée à la tête du greffe du tribunal de grande instance de Versailles et c'était en 2010 ! Mes enfants Jean-Christophe et Céline sont nés en 1987 et en 1988. J’ai alors demandé un temps partiel, autorisation que l’administration m’a refusée en raison des responsabilités particulières que j’exerçais en qualité de directrice de greffe.
Il m’est aussi arrivé de renoncer à demander certains postes afin de pouvoir concilier vie professionnelle et vie de famille. J'ai souvent ressenti la nécessité de devoir m'imposer ou me faire accepter dans certaines circonstances où je me suis sentie en minorité ou devant faire valoir des contraintes horaires liées à mes obligations familiales (ex : réunions tardives).
J’ai travaillé avec de nombreux chefs de juridictions essentiellement des femmes quand j’ai exercé mes fonctions au Tribunal d’instance mais une seule sur les 12 chefs de juridiction Présidents ou Procureurs des tribunaux de grande instance...
Qu’est-ce que FdJ peut apporter selon vous ?
Je pense que FdJ peut favoriser un dialogue entre des femmes ayant des expériences différentes en fonction de leur appartenance aux différentes directions du Ministère. Je souhaite qu’elle puisse aussi permettre, au sein des services judiciaires, des échanges nouveaux entre magistrates et femmes fonctionnaires.
Quel est votre parcours ?
Après avoir obtenu une maîtrise en droit européen et une maîtrise en science politique, j'ai intégré la Protection judiciaire de la jeunesse en qualité de directrice des services en 2003. J’ai d’abord été directrice du centre de placement immédiat de Pantin pendant près de cinq ans. Puis j’ai exercé les fonctions de chargée de communication auprès de la direction interrégionale de l’Ile-de-France et de l’Outre-mer avant de rejoindre à nouveau la Seine SaintDenis depuis 2011 comme directrice d’un service territorial éducatif de milieu ouvert (STEMO).
Pouvez-vous parler de votre métier et de vos fonctions actuelles ?
Je suis directrice du service territorial éducatif de milieu ouvert de Pierrefitte-sur-Seine (93). Ce service est composé de trois unités de milieu ouvert et d’une intervention éducative auprès des mineurs incarcérés à la maison d’arrêt de la Seine Saint-denis. Le STEMO comprend 47 agents : responsables d’unités éducatives, psychologues, éducateurs, assistantes de service social et adjoints administratifs. Ces équipes pluridisciplinaires ont pour mission d’aider à la préparation des décisions de l’autorité judiciaire et de mettre en œuvre les mesures et sanctions éducatives et les peines décidées par les magistrats.
Je suis garante du bon fonctionnement pédagogique et administratif du service. Ma fonction première est de diriger l’équipe des cadres de proximité en charge de chacune des unités (les responsables d’unités éducatives). Je représente mon Administration auprès des partenaires et dans le cadre des politiques publiques locales relatives à la justice des mineurs.
Mes fonctions sont extrêmement diversifiées. Si le management et le pilotage de l’activité du service représentent une part importante de mes missions, les instances partenariales et institutionnelles m’amènent à rencontrer des acteurs engagés et mobilisés au service de la jeunesse et à découvrir de multiples horizons (éducation spécialisée, association de prévention, magistrature, politique de la ville, services de police, Education nationale….).
Quels sont vos constats en matière de mixité, de parité et d’égalité professionnelle ?
La fonction de directeur des services de la Protection judiciaire de la jeunesse est un métier qui a connu une forte féminisation comme l’ensemble des métiers de la Justice. La direction de la PJJ est assurée depuis plus de trois ans par une femme, Catherine SULTAN.
La direction de la Seine-Saint-Denis, au sein de laquelle j’exerce mes fonctions depuis 2005, a presque toujours eu à sa tête un binôme femme homme tant en qualité de directrice/directeur territorial-e qu’en tant que directeur/directrice territorial-e adjoint-e.
Qu’est-ce que l’association femmes de justice peut apporter selon vous et quelle plus-value en attendez-vous ?
J’ai adhéré à FdJ car les questions d’égalité et de parité femmes-hommes me semblent des enjeux importants de société et ne me paraissent pas toujours aller de soi dans la vie professionnelle comme dans la vie personnelle.
En outre, maman d’un petit garçon de deux ans et demi, l’équilibre délicat entre ma carrière et ma vie privée est une préoccupation qui se fait plus présente aujourd’hui.
Je pense que FdJ pourrait me permettre de rencontrer des femmes qui se posent ou se sont posées les questions qui me traversent et me faire bénéficier de leurs expériences. Je n’ai pas encore eu l’occasion de m’inscrire à la session d’accompagnement professionnel organisée par l’association mais ce type de propositions m’intéresse beaucoup.
Pourquoi vous êtes-vous investie au sein de cette l'association Femmes de Justice ?
Il y a une féminisation croissante des nouvelles promotions de magistrats. Il serait important que le corps de la magistrature soit davantage le reflet du corps social avec un meilleur équilibre des sexes. On constate aussi que les femmes, bien qu'étant en très grand nombre dans la magistrature, accèdent très peu aux postes de la haute hiérarchie judiciaire. Là aussi, il me paraît nécessaire de trouver un équilibre des sexes.
Venons-en à votre parcours. Un parcours atypique pour deux raisons : d'abord, parce que vous êtes diplômée en philosophie et ensuite parce que vous avez été institutrice. Justement y a-t-il un lien entre la profession de magistrat et celle d'enseignant ?
Pour moi, il y a un lien très fort entre ces deux métiers. Lorsqu'on rédige une décision, on a le souhait qu'elle soit motivée, compréhensible et accessible, que la personne à laquelle elle est destinée la comprenne. C'est le même souci que l'on a quand on est enseignant.
Est-ce que votre formation en philosophie vous a également servie en tant que magistrate?
Ces études de philosophie m'ont permis de toujours me poser des questions, de toujours me remettre en question, de douter quand cela était nécessaire, d'arrêter des décisions quand il le fallait aussi. Cela m'a également permis de prendre du champ, du recul par rapport à mes fonctions, d'essayer de les inscrire dans un contexte plus large.
Quels souvenirs gardez-vous de votre passage à l'école nationale de la magistrature ?
Ces deux années marquent un peu d'une empreinte indélébile. C'est bien évidemment le moment où l'on se forme mais c'est aussi le moment où l'on naît, en quelque sorte, à la magistrature. C'est le moment où l'on prend pleinement conscience de ce que sera le futur métier de magistrat mais également la charge que cela implique sur le plan de la posture, de la déontologie.
A la sortie de l'école nationale de la magistrature, vous êtes nommée sur un poste où vous êtes principalement chargée de l'application des peines. Quel regard portez-vous aujourd'hui sur le rôle du juge de l'application des peines ?
C'est un rôle qui s'est beaucoup complexifié mais qui, je crois, est aujourd'hui beaucoup plus complet, beaucoup plus collectif.
"Au sein même du Ministère de la Justice, des processus d'invisibilisation de la profession se sont mis en place"
Magistrate, Chevalier dans l'Ordre National du Mérite et ancienne présidente de Femmes de justice de 2018 à 2022 - Interview Miss Konfidentielle 2020
Pour la journée internationale des droits des femmes, la Direction des services judiciaires s'est entretenue avec Gwenola Joly-Coz, présidente du Tribunal de grande instance de Pontoise et secrétaire générale de l'association Femmes de Justice. Cette dernière nous livre son point de vue sur la place des femmes dans la magistrature et présente l'association Femmes de Justice.
Qui peut adhérer à l'association Femmes de Justice ?
Peut adhérer à l’association Femmes de Justice toute magistrate et fonctionnaire de catégorie A relevant du ministère de la justice, exerçant en son sein ou à l’extérieur, en activité ou en retraite. L’association a fait deux choix très importants lors de sa fondation. Premièrement, elle a voulu proposer cette synergie à toutes les directions : services judiciaires, administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse.
Deuxièmement, elle a décidé d’être ouverte aux hommes, qui choisissent de s’afficher « he for she » (« lui pour elle ») et de porter un discours d’égalité entre les femmes et les hommes.
Quel est l’objet de l’association ?
L’objet social de l’association est de favoriser la réflexion sur la mixité et de promouvoir la parité dans la prise de responsabilité au sein du ministère, notamment en contribuant à la dynamique d’égalité entre les femmes et les hommes. Il s’agit d’alerter, de proposer, de favoriser la détection des talents féminins notamment en rendant visibles les compétences et l’expertise des femmes du ministère.
La féminisation des métiers du droit est un « impensé » sur lequel il convient désormais de mettre des mots afin de développer une politique publique lucide et volontariste.
L’association compte combien de membres ?
Nous avons été surprises des adhésions qui sont arrivées massivement lors de la création de l’association en juin 2014. Aujourd’hui, nous sommes plus de 300 adhérentes, avec un conseil d’administration et un bureau très dynamiques. Beaucoup d’adhérentes proposent spontanément leur aide et mettent leurs talents à disposition de l’association.
Nous avons déjà proposé de multiples actions : conférence sur les stéréotypes, colloque – échanges avec les associations « Femmes de l’intérieur » et « Femmes & diplomatie » sur la mobilité géographique, rencontre avec des personnalités, intervention dans les formations initiales et continues, séances de coaching…
L’association est-elle implantée sur tout le territoire et par quel vecteur ?
Des femmes de toute la France ont adhéré et nousrejoignent à Paris pour les assemblées générales, qui sont des moments de partages et d’échanges très stimulants ! Les adhérentes ont voulu dès le début qu’une vie régionale de l’association s’instaure. Malgré les difficultés géographiques, elles y arrivent et cherchent à s’associer avec les autres grandes associations de femmes de la fonction publique.
L’association va-t-elle mener des actions particulières pour la journée des droits des femmes ?
Des adhérentes prennent des initiatives. Le 8 mars 2015 était une journée consacrée à l’application de la loi du 4 aout 2014 pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes à la cour d’appel de Riom. Le 8 mars 2016, une conférence est organisée au TGI de Pontoise sur l’histoire de la féminisation des métiers du droit. FdJ s’associera également cette année à la signature par le garde des Sceaux de la convention d'engagement du ministère de la Justice pour une communication publique sans stéréotype de sexe, d'après le guide élaboré par le Haut Conseil à l'Egalité entre les femmes et les hommes.
Mais le 8 mars, c’est toute l’année…
Femmes de Justice, c’est d’abord l’histoire d’une rencontre bienveillante, d’une écoute attentive et d’une solidarité sans faille. Tout a germé au Tribunal de Grande Instance de Nantes dans les années 2000, entre Gwenola Joly-Coz, une jeune magistrate dynamique et moi-même, plus âgée, plus expérimentée. Un conseil, un soutien, de multiples affinités sur des sujets considérés comme essentiels et fondateurs…Et c’était parti, le lien d’amitié et de solidarité était né.
Chacune a fait son chemin professionnel, et un jour en 2013, nous nous sommes retrouvées à l’Inspection de la Justice. Dans ce creuset, à la faveur des missions, nous avons fédéré autour de nous des femmes venant des autres directions, nous avons partagé les constantes de notre condition, la condition féminine à la faveur des pauses déjeuners « sur le pouce »… pour ne pas perdre de temps !
Une fois partagés les échanges et les expériences, nous avons décidé de poser des actes, de fonder une association qui ne serait pas limitée aux magistrats, mais clairement ouverte aux femmes et aux hommes des trois directions métiers du ministère de la justice. Il y avait Sylvie, Gaxuxe, Isabelle, Nadine, Catherine, Gwenola et moi. Nous avons créé FdJ avec l’aide des Femmes de l’Intérieur, autre association plus ancienne, nos grandes sœurs.
Parallèlement, j’ai été désignée Haute Fonctionnaire à l’Egalité femmes-hommes, très honorée de créer une synergie entre les deux fonctions, comme beaucoup de fondatrices d’associations de femmes des ministères.
Mais rien n’était simple. Lorsque que l’on est en début de processus, il faut se faire une place, se faire reconnaître tant comme HFE que comme présidente de FdJ au sein du ministère de la Justice. Négliger les sarcasmes affichés ou sous-jacents, aller toujours de l’avant, fière des valeurs d’égalité et de parité défendues et forte du soutien de mes sœurs de FdJ. Avec le recul, j’ai eu l’impression de défricher une terre inculte avec, comme outil, ma force de conviction, tranquille mais déterminée, surtout une alliée indéfectible, efficace volontaire et stratège, Gwénola Joly-Coz. Elle a fourni argumentaires, chiffres et analyses au service de notre action de plaidoyer.
Il en fallait de la ténacité pour se faire reconnaître comme HFE à l’intérieur du ministère de la Justice : contacts avec le DSJ, le SG, plaidoyer devant le Comité Technique Paritaire pour tenter de décliner, pour la Justice, le protocole d’Egalité femmes-hommes pourtant signé par les organisations syndicales nationales. Mais aussi, il me fallait défendre les quelques acquis du ministère de la Justice devant le ministère des droits des femmes.
Il fallait également être visible, même à l’international. J’ai ainsi porté les couleurs de FdJ en Egypte, invitée par l’Institut Français du Caire, pour parler d’égalité à un parterre de femmes venant de nombreux pays méditerranéens, des féministes qui, pour certaines, portaient le voile traditionnel. Et pourquoi cette invitation ? Parce qu’un jour, lors d’une formation, Gwénola avait rencontré à Sciences-Po Paris, une jeune magistrate égyptienne… La solidarité c’est essentiel !
Si j’ai été une pionnière quelque part, je n’ai jamais été seule. Où que j’aille, j’ai trouvé des soutiens de femmes et d’hommes qui voulaient faire évoluer l’égalité et la parité au-delà des déclarations, dans les actes. Pourquoi ces soutiens ? Parce qu’ils renvoient à des expériences personnelles, familiales, voire intimes, ou professionnelles toujours fondées sur l’impérative nécessité de parité et d’égalité.
J’ai compris que l’égalité femmes-hommes ne peut se faire sans les autres, les hommes (qui peuvent adhérer à notre association), l’autre part de l’humanité, et les multiples réseaux féminins qui portent des valeurs similaires aux nôtres.
Pour ce qui est de ma mission de HFE, en 2014, 10% de mon temps y était consacré.
Progressivement cette proportion s’est accrue et Isabelle Rome, qui m’a remplacée en février 2017, est actuellement à plein temps sur cette fonction.
Le chemin est long, rien n’est définitivement acquis. Mais j’ai confiance dans les jeunes femmes qui ont repris avec cœur, détermination et ambition, le flambeau, notamment Ombeline, présidente actuelle de Femmes de Justice. Nous savons toutes que, malgré les pesanteurs structurelles, culturelles et sociétales, combien nos actions sont pertinentes et justes.
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